Le 9 décembre 2019, la Cour des comptes publiait son rapport sur l’Ordre des médecins. De manière synthétique, ce nouveau rapport relève que la gestion de l’Ordre « reste caractérisée par des faiblesses, voire des dérives, préoccupantes, son fonctionnement ne s’est pas suffisamment modernisé, des missions importantes qui justifient son existence sont peu ou mal exercées », même si « toutefois, nombre de conseillers ordinaux s’efforcent d’exercer leurs missions au mieux ».

Une large partie du rapport est consacré au constat que l’Ordre « empiète sur le champ syndical ». En effet, le juges de la rue Cambon font le constat que l’Ordre dispose d’une conception extensive de son rôle. Après avoir rappelé que « l’ordre est chargé de veiller au respect des règles de déontologie et d’assurer la défense de l’honneur et de l’indépendance de la profession », elle constate qu’ « à l’instar des autres ordres déjà contrôlés par la Cour, [l’Ordre] intervient fréquemment dans le champ de la défense des intérêts professionnels et sort régulièrement du champ déontologique au regard duquel il devrait apprécier l’impact des réformes qui lui sont soumises pour avis ».

Ainsi, si le Conseil national est chargé d’étudier les questions et projets qui lui sont soumis par le Ministre chargé de la santé, cela ne peut se faire « qu’au regard de ses seules missions » et de poursuivre qu’ « il ne lui appartient pas de se saisir lui-même, à l’occasion par exemple d’élections présidentielles, de sujets politiques ni de critiquer des textes législatifs ou réglementaires une fois qu’ils sont adoptés. Toute communication à caractère revendicatif se situe clairement hors du champ des missions d’un ordre ».

La Cour relève également que, sous prétexte de se considérer comme le représentant de tous les professionnels, l’Ordre se positionne comme un interlocuteur privilégié sur les réformes de santé à venir, ce qu’il n’a pas à être, même lorsqu’il est « encouragé parfois par les pouvoirs publics eux-mêmes ».

De même, la Cour relève qu’il n’appartient pas à l’institution ordinale de « défendre les intérêts de la profession au plan européen », alors même que pour les kinésithérapeutes, l’Ordre s’est récemment félicité d’intégrer la WCPT et donc sa section Europe. Les conclusions de la Cour des comptes sont d’autant plus importantes que la participation à de telles organisations internationales conduisent les Ordres à y contribuer financièrement de manière conséquente.

Enfin, la Cour des comptes relève que la communication ordinale opère un glissement sensible vers des actions relevant du champ syndical : lobbying sur des projets de Lois ou de textes, mise en place de consultations auprès des professionnels, etc., le tout en faisant usage des ressources financières hors des missions qui les rendent obligatoires.

Pour conclure, la Cour des comptes relève que « cette confusion des rôles est préjudiciable à l’image de l’ordre et à l’exercice de ses missions, elle est difficilement compatible avec son rôle de gardien impartial de la déontologie de la profession. Les budgets correspondant aux actions qui ne relèvent pas de l’ordre sont autant de moyens qui ne sont pas consacrés aux missions légales, dont l’enquête de la Cour a montré qu’elles étaient souvent délaissées ».